Pr Ousseini DIALLO est un médecin Radiologue au CHU Yalgado OUEDRAOGO et est le Président de la Société Burkinabè de Radiologie. C’est en 1990 qu’il devient Docteur en médecine après ses études au Maroc et rentre au Pays pour exercer comme médecin généraliste militaire. En 1996, il s’inscrit à la spécialisation en imagerie médicale en Belgique et devient radiologue en 2000. Il s’ajoute une formation en radio-pédiatrie en France et devient radio- pédiatre en 2002. De retour au Burkina, Pr DIALLO est affecté dans une structure de l’armée et devient enseignant à l’université. Il est alors détaché au CHU Yalgado OUEDRAOGO en 2004. Médecin militaire, radiologue et radio-pédiatre, Pr Ousseini DIALLO s’est engagé dans cette discipline au regard des insuffisances constatées pour venir en aide aux Burkinabè dans le domaine de l’imagerie médicale et surtout soulager les patients. Bien engagé dans cette profession qui le passionne tant, Pr DIALLO est l’actuel Président de la Société Burkinabè de radiologie. Cette semaine, nous découvrons ladite société avec lui.
Presse et Communication du CNOMB : Professeur, qu’est-ce que la Société Burkinabè de radiologie ?
Pr Ousseini DIALLO : la Société Burkinabè de Radiologie est une Société Savante dont le siège est à Ouagadougou et qui regroupe aussi bien les praticiens radiologues du secteur privé que du secteur public. Il existe également des membres sympathisants qui sont des radiologues d’autres pays comme la Côte d’Ivoire, le Togo, le Mali, etc. et également des sympathisants nationaux qui sont des membres d’autres sociétés telles que la société de traumatologie, la société de rhumatologie, la société de neurologie et j’en passe. Cette Société a été créée le 19 mars 2001 à Ouagadougou.
Pouvez-vous revenir un peu sur la genèse ?
Il faut d’abord noter que le premier radiologue du Burkina est le Dr Seydou Bernard OUEDRAOGO. Concernant la genèse de la Société Burkinabè de radiologie, l’idée est partie d’un de nos aînés, le Docteur Omar TRAORE qui malheureusement nous a quittés. Le Dr TRAORE a été formé en Côte d’Ivoire au Centre International de formation des radiologues africains francophones. Il a lancé l’idée qu’il n’a malheureusement pas pu mener à bout. Cette idée a été reprise par des jeunes radiologues issus de cette école et on a ainsi abouti à la formation du premier bureau en 2001. Ce bureau regroupait un certain nombre de radiologistes dont les Présidents d’honneurs, le Dr Seydou Bernard OUEDRAOGO, le Dr Louis OUOBA, le Président était le Professeur Rabiou CISSE, actuel Chef de service de radiologie à Yalgado OUEDRAOGO et Président d’Université de Ouagadougou, le secrétaire général était le Pr Abel BAMOUNI, la trésorière, le Pr Claudine LOUGUE, l’actuelle Ministre de la Santé, le Chargé de la communication, de l’information, le Dr Alassane SIKO, et il y avait un commissaire au compte, notamment une dame, le Pr Madina NAPON. Nous avons été élus en 2019, le bureau a été élargi, nous sommes 11 membres qui travaillons autour de trois Présidents d’honneurs. Nous avons pu créer une entité nouvelle, qui est l’entité chargée de la coopération, de l’innovation et de la recherche qui va beaucoup nous aider pour impulser les activités de cette société de radiologie. Actuellement, nous sommes fiers de dire que la société burkinabè de radiologie compte dans ses rangs environ 86 radiologues, 137 médecins en spécialisation en imagerie médicale, 122 manipulateurs en électroradiologie et 111 manipulateurs en formation en électro radiologie.
Parlons maintenant des activités que mène votre Société ?
Il faut d’abord savoir que l’objectif de la Société Burkinabè de radiologie est de dynamiser et de promouvoir la radiologie dans le pays. Notre objectif est de créer un cadre de concertation d’abord entre les radiologues et puis un cadre de concertation entre radiologues et les autres sociétés savantes. Un objectif qui n’est pas aussi négligeable c’est d’animer la vie scientifique en imagerie médicale et ce qui est important surtout, c’est de constituer une référence nationale pour toute question relative à l’utilisation des rayons X au Burkina Faso. Ainsi donc, les principales activités menées ont concerné d’abord les membres de cette société et ces activités étaient la formation, l’information à travers des colloques, des séminaires, des congrès, des ateliers, des conférences. Nous appuyons aussi le ministère de la santé en matière de conseils pour l’acquisition des appareils, pour la maintenance des appareils, pour la radioprotection, et actualité oblige, nous avons été très actifs par rapport à cette pandémie Covid-19, où nous avons réalisé un manuel de procédure où nous avons appuyé le ministère de la santé sur des aspects en imagerie médicale par rapport à cette pandémie virale. Les autres activités étaient des activités scientifiques notamment en rapport avec l’organisation des congrès. En 2003, c’était nos premières journées nationales, en 2006, il s’agissait d’un congrès conjoint Société Burkinabè de radiologie et société de radiologie d’Afrique Noire Francophone. En 2012, nos journées nationales, en 2015 et 2018 également. Après le Benin en 2019, qui avait organisé le congrès conjoint Société Béninoise de radiologie, Société de radiologie d’Afrique Noire Francophone, nous avions été mandaté pour organiser en 2020, ce congrès qui était prévu les 17, 18 et 19 2020 à Ouagadougou. Mais malheureusement, avec la pandémie de Covid 19, ce congrès a été reporté et nous sommes en train de viser présentement l’année 2021. Ce congrès est très important pour nous, parce qu’il va permettre à nos radiologistes de se mettre à jour et également nous allons pouvoir acquérir un certain nombre de connaissances, nous pensons même un peu changer les thèmes en rapport avec cette pandémie de Covid 19. Et à l’issue de ce congrès, si nous arrivons à l’organiser, ce qui est bien, c’est que nous allons prendre la Présidence de la Société de radiologie d’Afrique Noire Francophone pour une année.
En matière de pratique médicale, d’éthique et de déontologie, comment prônez-vous le respect de ces notions auprès des médecins de votre société ?
La première collaboration c’est avec l’Ordre des médecins, donc il faut qu’ils soient tous inscrits à l’Ordre des médecins, il faut qu’ils participent aux activités de l’Ordre des médecins. Ensuite, nous prônons la collaboration entre les différents médecins, le respect des collaborateurs et le respect des patients. Quand on est devant un patient, il faut considérer que ce patient est votre papa, votre maman, votre sœur, votre frère, votre ami. Si vous avez cette donnée, automatiquement, la prise en charge va être optimale. Pour ce qui concerne la formation de nos spécialistes en imagerie médicale, nous pensons insérer un module par rapport à la déontologie médicale. Ça va permettre de résoudre beaucoup de problèmes et nous allons inciter tous les radiologistes de la SOBURAD dans ce sens et d’ailleurs, c’est l’une des conditions pour qu’ils adhèrent à la société et d’accepter le règlement intérieur.
Quelles sont les valeurs que vous prônez au sein de votre société ?
La première valeur c’est l’humilité. Il faut être humble, il faut également respecter autrui et respecter le secret médical. Il faut être solidaire, il faut un savoir-faire et un savoir être, c’est-à-dire un professionnalisme et il faut une bonne collaboration. Les échanges, c’est très important. Il faut communiquer, apprendre et partager les connaissances. Nos ancêtres de la radio disaient ceci : l’œil ne voit pas ce que l’esprit ne sait pas. Il faut apprendre et c’est ce que nous disons toujours aux étudiants qui viennent dans le service.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?
Des difficultés d’ordre général. D’abord, il y a la pratique illégale de l’imagerie médicale, c’est un problème qui nous implique et qui va impliquer aussi l’Ordre des médecins, par ce que les conseils régionaux de l’Ordre peuvent voir dans les différentes régions ceux qui ne sont pas habiletés à pratiquer l’imagerie médicale. Ça pose problème parce qu’on aboutit à des diagnostics erronés.
La 2e difficulté, c’est la problématique des équipements et de leur maintenance et il faut trouver des solutions. Soit nous formons des équipes de maintenance assez pointues, ou nous essayons de trouver une solution en attendant. Par exemple pour nos hôpitaux, c’est beaucoup plus rentable d’avoir deux scanners qui sont bien et qui vont s’entretenir. Donc, ce sont des solutions d’attente pour avoir une structure de maintenance hautement certifiée partout. A Ouagadougou, sur 11 scanners, 9 au privé et 2 en public dont un en panne. Une autre difficulté est qu’on a encore quelques radiologues qui n’adhèrent pas à la Société de radiologie, il y a des anciens, des moins anciens, des jeunes, et c’est un cri de cœur en même temps pour les inviter à adhérer la société.
Il y a aussi les ressources financières qui sont limitées. La Société vit sur les cotisations de ses membres et lorsque nous avons des évènements importants, notamment des congrès assez lourds à organiser, on fait des plaidoyers pour pouvoir demander un certain nombre de ressources à des ministères, à des firmes, à des sociétés.
Des suggestions pour une bonne pratique de la médecine au Burkina Faso ?
Globalement, il y a trois choses :
Il y a d’abord la formation continue. Le jeune médecin doit se former de façon continue. Le médecin qui est également en fin de carrière doit faire une formation continue, parce que c’est en ce moment qu’il donne des conseils à ces jeunes-là.
Il y a l’évaluation de notre pratique professionnelle, il faut se remettre en cause, on voit une nouvelle catégorie de thèses, qui évaluent la pratique professionnelle, par exemple est-ce que nos salles d’échographie sont conformes ? Est-ce que les écographies obstétricales sont conformes ? etc. La 3e chose, c’est l’auto-évaluation. C’est personnel, c’est très important.
Hormis ces aspects, il y a autres choses comme renforcer les capacités des ressources humaines, l’équipement correct des formations sanitaires, le fait de mutualiser les ressources pour les IRM et la maintenance des appareils. Lorsque l’assurance maladie universelle va être fonctionnelle, cela va arranger beaucoup de choses. Il faudra aussi respecter les règles de déontologie et d’éthique médicale. Enfin, il faut valoriser la profession médicale au sens large du terme. Un médecin ne doit pas souffrir pour venir rendre service à un patient.
Vos ambitions pour les médecins de votre Société ?
C’est d’abord le renforcement en personnel, en radiologues, en manipulateurs, parce que nos premiers collaborateurs, ce sont les manipulateurs, nous travaillons en binôme. Il faut développer l’esprit d’échange et de collaboration. Nous voulons inciter aussi les jeunes à des spécialisations pointues. Nous commençons à avoir beaucoup de radiologues, c’est une idée de nos maîtres depuis fort longtemps, nous allons tendre vers les spécialisations d’organe, c’est-à-dire, qu’il y a des jeunes qui vont se former en imagerie du crâne, d’autres en imagerie du Thorax, en imagerie de la femme, etc. Il faut que nos radiologistes respectent les règles d’éthique et de déontologie médicale.
Vos rapports avec les autres sociétés savantes ? Vos rapports avec l’Ordre des médecins ?
La première société savante, c’est celle qui est à côté de nous comme je l’ai dit, la société des manipulateurs, puisque nous travaillons ensemble. Avec les autres sociétés savantes du Burkina Faso, nous avons de très bonnes relations dans la mesure où nous participons à leurs activités, nous incitons les membres de notre Société à produire des conférences, à faire des productions scientifiques pour leurs congrès, et nous les invitons aussi à nos congrès. Il y a eu un de nos congrès où, pour la cérémonie de clôture, le Maître de Cérémonie était un pneumologue. Il y a une très bonne collaboration avec les sociétés savantes locales. Nous faisons partie de la société d’Afrique Noire Francophone, qui organise maintenant chaque année un congrès dans un pays africain. Au-dessus, il y a la société française de radiologie, le fait que nos radiologues adhèrent à la société burkinabè de radiologie, leur donne des possibilités pour adhérer à la société de radiologie d’Afrique Noire Francophone et également pour adhérer à la Société Française de radiologie. Ils ont droit à une réduction pour l’inscription à leurs congrès. Egalement, il y a des prix spéciaux qui sont attribués à ces jeunes radiologues, on avait même une radiologue qui avait été proposée pour être primée en 2020 mais on espère qu’elle pourra avoir cette bourse en 2021.
Avec l’Ordre des médecins, nous avons de bons rapports. Je pense que nous sommes tous inscrits à l’Ordre des médecins, seulement, il va falloir qu’on voit certaines questions, notamment par rapport à la pratique illégale de l’imagerie médicale et de ce côté-là, nous devons travailler en symbiose pour pouvoir mettre fin à ce fléau.
Un message à l’endroit des radiologues de votre société ?
Avant d’adresser un message aux radiologues du Burkina Faso, je voudrais tout d’abord remercier toutes les sensibilités qui œuvrent, qui travaillent d’arrache-pied pour que cette société marche. Nous sommes une famille, les radiologues s’y reconnaissent et les uns et les autres contribuent fortement pour que la radiologie brille dans ce pays. Comme message, je voudrais d’abord dire que je parle avec l’appui de nos maîtres, parce que dans notre société, il y a des radiologues anciens, des radiologues moins anciens et des jeunes radiologues. Mon message va s’adresser aux jeunes radiologistes parce qu’il faut considérer les aînées de l’imagerie médicale comme votre maman. C’est une maman spéciale qui a mis au monde un bébé, parce que pour ce bébé, on n’a pas sectionné le cordon ombilical, tous les radiologues ont gardé le cordon ombilical avec les jeunes radiologues pour continuer à les transfuser et c’est important. En conséquence, la première des choses, vous leur devez une considération, un respect et vous devez continuer leur œuvre, donc être professionnel. Il faut que les gens échangent entre eux pour pouvoir mettre le patient au centre de toutes les actions.
Dernier conseil, ne vous précipitez jamais dans la vie. Une anecdote, moi ma passion, c’est la pêche sportive et c’est mon papa qui m’avait appris à attraper les poissons un à un. Puis un jour, j’ai demandé à mon papa, pourquoi tu m’as appris à attraper les poissons un à un, alors qu’on peut aller jeter le filet et sortir 50 poissons du coup. Mon papa m’a dit, l’essentiel à la pêche ce n’est pas le nombre de poisson, l’essentiel c’est de mettre de l’ordre dans les idées lorsque le poisson ne mord pas. Ne vous précipitez pas, réfléchissez toujours avant de prendre une décision. Je voudrais vous remercier pour cet entretien, nous espérons avoir été à la hauteur de vos attentes, nous vous souhaitons beaucoup de courage. Vive la SOBURAD et vive l’Ordre national des médecins du Burkina.
Presse et Communication du CNOMBF