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Dr Kaboré

Il s’appelle Dr Noaga Jean-Paul KABORE, il est le 4e Cardiologue du Burkina, Dr KABORE fait partie des pionniers de la cardiologie au Burkina Faso. Il mène ses études de médecine générale et de spécialisation à l’université Cheick Anta Diop de Dakar et devient Docteur en médecine en 1989 et médecin cardiologue en 1991 et revient au pays. Il est alors affecté au CHU Yalgado OUEDRAOGO où il va travailler de 1991 jusqu’à son admission à la retraite. En fin 2010, il prend une disponibilité pour travailler dans son cabinet médical Dr KABORE Noaga Jean Paul et réintègre à nouveau le CHU Yalgado OUEDRAOGO à la fin de cette disponibilité et y reste jusqu’à son admission à la retraite en fin 2019. Il consacre actuellement tout son temps à son cabinet médical. Un pionnier de la cardiologie au Burkina, Dr Jean Paul KABORE a été beaucoup marqué par cette spécialité lors de ses études en médecine. L’homme n’a jamais été Chef de service de toute sa carrière professionnelle, mais il a toujours su travailler avec ses chefs dans le sens de donner une image rayonnante au service et de l’équiper convenablement. Dans la rubrique’’ Chez nous Médecins’’ sur les pionniers de spécialités, nous sommes allés à la rencontre cette semaine de Dr Noaga Jean Paul KABORE, un ‘’ Baobab’’ de la cardiologie pour revivre ces temps forts.

Presse et Communication du CNOMB : nous savons que vous êtes un pionnier de la cardiologie au Burkina, racontez-nous comment c’était à l’époque ?

Dr Noaga Jean-Paul KABORE : je ne suis pas le pionnier. Le pionnier c’est le regretté, notre grand-frère, Dr OUANDAOGO Joseph qui est décédé en décembre 2019, après lui, il y a eu  Dr DORO qui malheureusement est décédé  le 22 septembre 1992, ensuite, il y a eu le Dr GUEKOUMA  François qui est à Bobo Dioulasso et après ces trois,  je suis rentré en 1991 et j’ai été affecté au CHU Yalgado Ouédraogo où j’ai pris service en septembre 1991.

Au départ à Yalgado comme nationaux, nous étions nous trois. Il y avait un médecin cardiologue russe que je suis venu trouver, il s’appelait Javernoc.

A matière de cardiologie, il faut reconnaître qu’il n’y avait pratiquement rien, on n’avait même pas un électrocardiographe, à tel point que j’ai été obligé d’amener mon propre appareil électrocardiographique pour essayer de dépanner le service. Ensuite, j’ai eu à rencontrer personnellement  le Directeur de l’hôpital qui s’appelait en son temps, Ousmane OUEDRAOGO et c’est là qu’on a commencé à avoir un appareil doté par l’Etat au niveau du service et qui nous a permis de commencer la cardiologie.

Sur le plan cardio-vasculaire, on n’avait pas grand-chose, on se débrouillait tant bien que mal pour essayer de prendre en charge les malades.  Le service de cardiologie était installé au 2e étage, si j’ai bonne mémoire on devait avoir une trentaine de lits, un chambre à une place et deux chambres à deux lits, les autres étaient de grandes salles. Quand je suis arrivé, on hospitalisait les hommes dans les mêmes salles que les femmes, je trouvais qu’il fallait les séparer pour respecter l’intimité des uns et des autres. C’est ainsi que j’ai été amené, personnellement avec l’accord du Chef de service en son temps, pour séparer les hommes et les femmes. Sur mon initiative avec l’accord du Chef de service, on a eu à rencontrer le ministre de la santé d’alors qui était M. Amadou OUIMINGA pour négocier qu’on nous descende de l’étage pour soulager les malades. On n’a pas obtenu cela sitôt jusqu’à l’arrivée de l’actuel premier ministre qui était le ministre de la santé. On est resté à l’étage jusqu’à dans les années 1998 quand il a été décidé de réfectionner le grand bâtiment. Ce qui nous a permis de descendre. En ce temps, nous étions là où se trouve actuellement la neurochirurgie, et quand on a fini la réfection du nouveau bâtiment, on a souhaité que nous remontions. J’ai refusé.  Il faut reconnaître que j’avais la chance d’avoir un  Chef de service était assez compréhensif, il me laissait prendre des initiatives, il n’a jamais désapprouvé les actes que je posais.  Après moi, c’est le Pr ZABSONRE qui est rentré et il a été envoyé à Bobo-Dioulasso. Ensuite, le Dr TOGOGNINI Jean Yves  est rentré et il a été envoyé à Koudougou. En 1993, c’est l’actuel Pr SAMANDOULGOU André qui est rentré.  Il n’avait pas de bureau. Avec le Chef de Service, on était obligé de faire un petit appendice pour que ça lui serve de bureau. Le 2e cardiologue étant décédé en 1992, son bureau était resté vide.  Quand le Pr NEBIE est rentré, on avait eu la chance d’avoir un médecin généraliste, le Dr PITROIPA Xavier qui était en train de faire un test pour aller faire de l’Anthropologie à Bouaké. On a récupéré son bureau que j’ai fait affecter à Pr NEBIE. Ensuite, il y a l’actuel Pr NIAKARA qui est venu dans le service.

4e cardiologue du Burkina, comment vous vivez ce privilège ?

Non, ce n’est pas un privilège. Je ne suis pas un pionnier. C’est vrai que nous avons déploré le décès du Dr DORO qui était vraiment prématuré. Dr GUEKOUMA qui était à Bobo n’a pas voulu venir à Ouaga, ce qui a fait que moi j’ai pu facilement être affecté à Yalgado. J’ai fait de mon mieux.  On n’a pas besoin d’être nommé Chef de service, pour faire ce qu’on à faire. C’est le service de tout le monde. C’est une profession prenante qui demande de la disponibilité. Il y a quelques-uns qui ont bien voulu suivre nos pas et je pense qu’ils ne le regrettent pas.

 

Quelle a été votre stratégie pour attirer des médecins dans votre spécialité ?

C’est par un bon comportement, le fait de leur donner le goût de la cardiologie,  tous ceux qui me connaissent savent que personne n’arrive au service avant moi sauf celui qui est de garde. Il y a certainement cette assiduité, j’exigeais des étudiants qu’ils soient assidus et ponctuels, je ne le regrette pas même si certains pensaient que j’étais le plus méchant du lot. Je n’ai jamais été en train d’insulter un étudiant.  J’étais le plus présent, OUANDAOGO étant un médecin militaire, il n’était pas tout le temps disponible à Yalgado. Nous qui étions peut-être les premiers sur le terrain ont su susciter l’engouement pour la cardiologie.  Personnellement, au départ, je n’étais pas d’accord pour la répartition, parce que nous voudrons qu’on crée un pool d’excellence quelque part et à partir de là, quand ça va prendre racine, qu’on puisse maintenant repartir les cardiologues pour leur permettre d’être plus efficients.

Pourquoi vous n’avez pas voulu être Hospitalo-universitaire ?

C’est une question de vocation. Ça ne m’a pas tellement intéressé. Quand je vois l’investissement que ça doit impliquer, il faut une certaine disponibilité permanente et être surtout un exemple qui tire surtout vers le haut et non vers le bas.  Voilà un ensemble de choses qui ne me permettaient pas d’être hospitalo-universitaire. Il fallait forcement s’investir. En son temps, les Professeurs prenaient leur rôle comme un véritable sacerdoce. Quand je voyais mon Directeur de Thèse en Neurologie, à 6H il était au service et il commençait son travail. C’est lui-même qui faisait ses examens, il avait un dictaphone, il enregistrait ce qu’il voyait en faisant l’examen pour donner à la secrétaire pour transcription. Il y a un investissement total. Moi, je n’étais pas très sûr d’avoir cette capacité.

Aujourd’hui, on a un grand nombre de médecins cardiologues, comment vous vivez cette éclosion ?

Avec beaucoup de joie.  Je vais vous faire une confidence, le Chef de service actuel peut témoigner. Il avait été question de créer le DES de cardiologie. Notre Chef de service d’alors, Pr ZABSONRE, lui se battait plutôt pour créer les Attachés de santé en cardiologie. Je me suis dit non, avec tous ces jeunes qui ont envie de faire la cardiologie, je pense que c’est mieux de les former plutôt que de former des attachés de santé en cardiologie. Voilà comment les choses ont évolué. Au début, il me faisait comprendre qu’il était tout seul, qu’il risque d’être abandonné à son triste sort, je dis néanmoins il faut se jeter à l’eau. J’ai tenu à ce qu’on fasse le DES de cardiologie et je pense que je ne peux pas le regretter. J’ai réussi à le convaincre avec l’aide d’autres personnes de la sous- région. Ça nous a beaucoup plu.

Nous savons que vous êtes le 2e Président de la Société de cardiologie du Président, racontez-nous un peu ce passage à la tête de cette société ?

Sa création, c’était sur initiative de Pr NIAKARA que nous nous sommes lancés. Il y a une vingtaine d’années que nous avons créé la Société de Cardiologie du Burkina. Notre aîné Dr OUANDAOGO a été élu Président de la société, c’est le 1er Président de la Société de Cardiologie du Burkina. Mais compte tenu du fait, qu’il faisait face à certaines contraintes, cela bloquait un peu le fonctionnement de notre société.  Il a fait un an et nous avons eu à le rencontrer pour lui suggérer qu’on prenne quelqu’un d’autre. C’est ainsi que j’ai été désigné Président de la Société de Cardiologie du Burkina que j’ai dirigé pendant 13 ans. J’insiste, j’ai été parmi les membres fondateurs de cette société.

 

Quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes ? Des suggestions aussi s’il y a lieu d’en faire ?

Au fur et à mesure qu’ils sortent, comme je l’ai souligné au départ, là où on vous envoie, il faut vous battre pour qu’un service de cardiologie puisse voir le jour. Il ne faut jamais se décourager. Quand j’arrivais au service de cardiologie, on n’avait même pas un électrocardiogramme, mas cela ne nous a pas empêché de nous battre pour obtenir à un moment donné que la cardiologie soit l’un des services pionniers de Yalgado. On n’avait pas grand-chose, le Chef de service étant parti en congé, j’assurais l’intérim du service, comme j’ai remarqué qu’il y avait pas mal de choses qui ne marchaient pas, je suis allé avec mes jeunes confrères poser le problème au Directeur de l’hôpital. Il nous a fait des promesses, on a attendu plus de deux semaines, rien ne bougeait, et je me suis permis de prendre ma plus belle plume et je lui ai proposé qu’on ferme le service de cardiologie jusqu’au moment où on aura le minimum qui nous permet de fonctionner et je l’ai fait avec ampliation au ministère de la santé, au PCA de Yalgado et au Syndicat. En une semaine, on a eu une vingtaine de tensiomètres, on a eu trois électrocardiographes et en un mois l’appareil électrocardiographe qui avait été abimé suite à l’inondation de 2009 a été réparé. Et quand  le Chef de service est rentré de son congé, je lui ai fait le point.  Donc, je leur conseille de se battre partout où ils sont. Il ne faut pas vous décourager. Avec l’aide des bonnes volontés, on peut au moins avoir un embryon de service de cardiologie. Notre principal problème, c’est de faire en sorte que la cardiologie soit accessible à un plus grand nombre de personnes. Ce n’est pas facile pour quelqu’un de quitter Djibo ou Dori pour venir faire une consultation de cardiologie à Yalgado. Ça implique beaucoup de dépenses, beaucoup de contraintes.

Je conseille aux jeunes de ne pas hésiter à aller voir les premiers responsables du Ministère de la santé. Ce que vous proposez, c’est pour la population et si on arrive à le faire, ça rend service aux populations.  Il faut savoir se battre et se battre de façon honnête sans tricher et on obtient de bons résultats.  

Presse et Communication du CNOMB

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