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Dr Béraré DOUDOULGOU

Exercer la Médecine c'est faire preuve de professionnalisme, c'est faire attention aux manquements ou fautes qui peuvent porter préjudice à la carrière professionnelle du médecin. Ce qui nécessite une connaissance approfondie des textes en rapport avec la pratique médicale. Dans la mesure où la responsabilité du médecin est engagée, il doit faire preuve de sagesse médicale. La définition de la faute médicale, les différents types de fautes, les sanctions possibles, les précautions à prendre etc. Nous faisons le point avec Béraré DOUDOULGOU, Médecin Légiste.

Comment définissez-vous la faute médicale ?

Dr Béraré DOUDOULGOU : Une faute est définie selon le dictionnaire « le Robert » comme un manquement à une règle morale, à un devoir ou à une mauvaise action.

La faute médicale peut donc être définie comme un manquement à une obligation juridique et/ou morale par un professionnel de santé.                                                                                                                 

Il est important de faire la différence entre une faute, un aléa et une erreur.                                               Dans le domaine médico-légal, la jurisprudence a progressivement distingué la faute médicale de l’erreur médicale et de l’aléa médical. La différence entre aléa et faute se situe dans l’existence d’une éventuelle responsabilité et d’une éventuelle réparation. L’aléa médical (thérapeutique) peut être défini comme un évènement dommageable survenu au patient sans qu’une maladresse et plus généralement une faute quelconque puisse être imputée au praticien et sans que ce dommage se relie à l’état initial du patient ou à son évolution prévisible. Il s’agit de la manifestation du hasard. Quant à l’erreur médicale, elle est une mauvaise appréciation d’une situation ou une anomalie de jugement ou d’interprétation du praticien. Elle n’est rien d’autre, tant que ce dernier a respecté les bons usages et l’obligation de moyen.

Quels sont les types de faute médicale ?

Il existe plusieurs types de faute médicale que sont :

La faute pénale : Encore appelée infraction, elle est un comportement répréhensible par la loi pénale et sanctionné par une peine prévue par celle-ci. Elle peut être une contravention, un délit ou un crime. Les fautes pénales sont prévues par le code pénal burkinabè. Dans le domaine de la santé, il s’agit entre autres de : 

Les violences volontaires faites aux patients, les faux certificats, l’infraction à la législation sur les stupéfiants, l’euthanasie, la stérilisation humaine volontaire sans finalité thérapeutique, l’interruption illégale (volontaire) de grossesse, l’expérimentation sur une personne sans son consentement, la violation du secret médical, la non-assistance à personne en péril (en danger), le manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence, l’homicide involontaire (le fait de causer par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation d’une loi ou d’un règlement, la mort d’autrui) et les atteintes à l’intégrité physique involontaires qui n'ont pas entraîné la mort.

La faute civile : Elle est largement contractuelle et demeure fondée sur l’arrêt Mercier qui stipule que « Entre le médecin et son patient, il se forme un véritable contrat comportant pour le médecin l’engagement de donner des soins non quelconques mais consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science et pour le patient d’honorer le médecin et de suivre les prescriptions ».                                                                                                                                                                             

L’inexécution de ce contrat constitue une faute civile contractuelle pour le praticien.

La faute contractuelle peut être une faute contre l’humanisme (assimilée à une faute morale) à savoir le non-respect de la personne humaine, le manque à l’obligation d’assistance à personne en péril ou la violation du secret médical. Elle peut aussi être une faute de technique médicale. Dans ce cas, elle peut survenir lors de l’établissement du diagnostic, du traitement ou de la surveillance.

La faute civile peut dans une moindre mesure être extra contractuelle en cas d’absence du contrat ente le praticien et son malade. Dans ce cas, elle est délictuelle (volontaire) ou quasi-délictuelle (involontaire).

La faute administrative : encore appelée faute de service, il s’agit d’une faute civile commise par un praticien salarié ou par un préposé d’une administration hospitalière dans les limites de ses fonctions.

La faute déontologique : est un manquement aux règles déontologiques médicales.  Il importe de préciser que la faute déontologique peut être aussi civile et/ou pénale. Nous avons par exemple la violation du secret médical qui constitue d’abord une faute déontologique car interdit par le code de déontologie médicale, ensuite une faute civile notamment classée dans les fautes contre l’humanisme et enfin une faute pénale, sanctionnée par le code pénal burkinabè.

Une faute médicale engage-t-elle la responsabilité médicale ? Comment ?

Toute faute médicale engage la responsabilité de son auteur ou de l’administration hospitalière de l’auteur. L’engagement de la responsabilité médicale est fonction de la faute médicale commise :

Devant une suspicion de faute pénale ou civile, la victime et/ou ayant-droit peut déposer une plainte auprès des Officiers de Police Judiciaire (OPJ) ou devant les tribunaux de droit commun.

Lorsqu’il s’agit d’une suspicion de faute pénale, la justice (le parquet, le juge d’instruction ou les OPJ) après avoir reçu la plainte, ouvre une information judiciaire (enquête). Pour des besoins de l’enquête, une perquisition du dossier médical ou de tout autre élément susceptible de concourir à la manifestation de la vérité peut être ordonnée. Par ailleurs la justice peut réquisitionner un médecin expert pour un avis technique (autopsie ou expertise sur dossier médical) afin de mieux qualifier les faits. Si les données de l’enquête sont concluantes, alors la responsabilité pénale du praticien est mise en cause.

Quand il s’agit d’une suspicion de faute civile, il faudra d’abord que la faute ait occasionné un préjudice/dommage (physique ou moral). La demande de réparation (dommages et intérêts) est formulée devant le tribunal civil qui à son tour peut ordonner une expertise médicale afin d’établir s’il y’a effectivement une faute, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage. C’est la réunion de ces trois éléments qui permet d’engager la responsabilité civile du professionnel de santé.

Devant une suspicion de faute administrative (faute de service), la victime doit d’abord formuler une demande auprès de la direction de l’établissement sanitaire afin de réclamer des dommages et intérêts. C’est seulement en cas de refus de l’administration hospitalière que la victime peut saisir le tribunal administratif pour demander une réparation. Dans ce cas, il faudra encore qu’il ait une faute, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage pour engager la responsabilité administrative de l’établissement de santé.

Devant une suspicion de faute déontologique, la victime doit saisir la chambre disciplinaire du conseil régional de l’ordre des médecins (CROM) du ressort du praticien. Cette chambre va statuer et sanctionner éventuellement le praticien en cas de manquement manifeste aux règles déontologiques médicales.

Pour une même faute médicale (violation du secret médical par exemple), la responsabilité pénale, civile et déontologique du praticien peut être engagée simultanément.

Comment doit réagir le médecin devant une faute médicale ?

En cas de faute médicale, le praticien doit expliquer clairement la faute au malade ou à ses ayants-droits. Une bonne communication entre le praticien et son malade/ayants-droits permet de résoudre la grande majorité des conflits. Il faut surtout éviter le mépris et la falsification des dossiers médicaux qui constituent de prime à bord une attitude culpabilisante du praticien. 

 Les sanctions possibles devant une faute médicale ?

Les sanctions sont fonction du type de faute médicale commise. Ainsi :

  • Devant une faute pénale établie, les sanctions sont prévues dans le code pénal burkinabè. Elles sont en fonction de l’infraction commise.
  • Devant une faute civile ou administrative, c’est la réparation encore appelée « dommages et intérêts ».                                                                                                                                                                                         

Pour une faute civile, l’indemnisation de la victime se fera sur la base d’une expertise en réparation du dommage corporel suivant un code bien déterminé par la mission.

En cas de faute administrative la réparation peut se faire à l’amiable (entre la direction et la victime) ou sur la base d’une expertise en réparation du dommage corporel devant le tribunal administratif.

  • Devant une faute déontologique, les sanctions sont prévues par le code de déontologie médicale burkinabè (avertissement, blâme, interdiction temporaire, radiation et autres mesures jugées appropriées)

Quelles sont les précautions que le médecin doit prendre pour éviter les fautes médicales ?

Pour éviter les fautes médicales, le praticien doit d’abord exercer son art avec professionnalisme tout en respectant les textes règlementaires en vigueur au Burkina Faso. Par ailleurs, il doit agir en toutes circonstances selon les règles éthiques et déontologiques dont un des grands principes est « Primo non nocere ». En fin le praticien doit donner des soins conformes aux données acquises de la science aux malades.

CNOMBF

 

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